L’histoire de Jean et son tendon d’Achille droit
Aujourd’hui, j’ai choisi de vous raconter l’histoire de Jean et de sa blessure au tendon d’Achille droit. Jean à 43 ans, il fait partie du personnel volant c’est-à-dire qu’il travaille dans les avions. Il aime le sport et particulièrement la course à pied. Il a néanmoins une crainte depuis près de 10 ans maintenant suite à une tendinopathie d’Achille (côté droit également), lui ayant donné du fil à retordre. En effet, il garde en mémoire cet épisode traumatique qui l’a écarté des sentiers pendant 4 longues années.
Jean avait beau collectionner les séances de kiné et les avis médicaux, rien n’y faisait, ça ne passait pas. Puis après avoir testé toute sorte de thérapie plus ou moins conventionnelle, la douleur a fini par s’estomper. Jean a pu reprendre progressivement la course à pied pour son plus grand bonheur.
Ces dernières années, il court régulièrement pour le plaisir. Il n’ose pas aller plus loin, car le souvenir douloureux des années passées est encore bien présent. Son rythme en course à pied est donc aléatoire en fonction de la saison, de ses envies et de son activité professionnelle.
Nous arrivons à l’automne et Jean a couru régulièrement pendant l’été, environ deux fois par semaine. Le mauvais temps arrivant et le terrain se dégradant, il décide d’investir dans de nouvelles chaussures de course. Pas de mauvaise pub ici ! Il s’agit des Sp…. bref une chaussure plutôt maximaliste avec un gros talon qui fait qu’on ne sent rien et rajoute un poids considérable. Il se sent en confiance lors de ses sorties et souhaite maintenir son entraînement pendant la saison hivernale.
Jean continue de s’entraîner normalement avec ses nouvelles chaussures. La 5eme sortie est un peu plus longue que d’habitude, il doit également faire face à plusieurs petites grimpettes bien boueuses. La sortie course à pied rime alors beaucoup plus avec un parcours du Mud Day où une épreuve d’Interville (pour les plus anciens :-)). Soudain, une petite pointe sournoise fait son apparition à l’endroit tant redouté … La douleur n’est pas importante et ne l’empêche pas de finir la sortie. Malgré cela, le niveau d’anxiété et la peur de retomber dans un nouvel épisode douloureux rejaillit inévitablement.
2h après la sortie, la gêne s’installe. Notre coureur, met de la glace et de la gaulthérie puis prend rendez-vous avec le Doc. Verdict : nouvelle tendinopathie d’Achille, il lui prescrit une IRM, des anti-inflammatoires et des séances de rééducation.
Jean consultera dix jours plus tard son kiné du sport. Lors du bilan, il boite encore un peu, la douleur est moins intense, mais présente encore dans le quotidien. Il décrit une sensation d’étau. On remarquera un léger Aglund (excroissance osseuse au talon) et une usure particulièrement prononcée au niveau du talon intérieur de ses chaussures. Passer sur les pointes de pieds est possible, mais gênant si le mouvement est répété plusieurs fois.
Analyse du cas
- Jean a vécu un long épisode douloureux il y a 10 ans. Quatre longues années se sont écoulées avant qu’il ne puisse reprendre la course à pied. 4 années de galère et de douleur. Cet épisode a forcément laissé des traces, pendant cette période, Jean s’est déconditionné à l’effort et il a perdu son adaptation spécifique à la course à pied. De plus, la douleur devenue chronique est presque « normale » pour lui, en tout cas pour son cerveau. Ne plus avoir mal n’était plus la norme. Nous ne détaillerons pas les mécanismes de la douleur ici, mais au-delà de l’atteinte mécanique, cette longue convalescence l’a également touché au niveau central.
- Jean a repris la course à pied ces dernières années, mais de façon non régulière. Son activité professionnelle lui demande impose beaucoup de déplacements, et il subit régulièrement les décalages horaires. L’adaptation de ses tissus n’est donc pas optimale. De plus, quand vous êtes dans un avion, vous subissez des changements de pression réguliers. Pour le voyageur occasionnel partant en vacances, ça n’a que peu d’impact. Pour le personnel naviguant en revanche ces variations de pression peuvent conduire à un défaut de fonctionnement du système lymphatique et un mauvais retour veineux. N’avez-vous jamais eu les jambes gonflées après un long courrier ? Ce dysfonctionnement peut malheureusement conduire à un ralentissement des phénomènes de guérison et d’adaptation.
- À l’automne, il décide de faire une sortie un peu plus longue que d’habitude, avec davantage de dénivelés, avec un changement de chaussures récent. Il n’en fallait pas moins pour dépasser sa capacité maximale d’adaptation. On retombe, comme dans plus de 80% des blessures tissulaires non traumatiques du coureur, dans le célèbre « un peu trop, trop vite, trop fort, trop tôt ». L’élément le plus irritant de cette sortie reste les montées boueuses. En effet; vous cumulez une augmentation considérablement la charge sur votre tendon d’Achille et un travail à grande amplitude.
- La douleur s’installe dans les heures suivant l’entraînement. Il décide de consulter le médecin qui lui recommande la glace et lui prescrit des anti-inflammatoires. Pour les recommandations en termes de gestion des blessures tissulaires non traumatique, je vous renvoie au protocole « PEACE & LOVE » détaillé sur le site (article à venir).
- Jean consulte en kinésithérapie 10 jours après l’apparition des symptômes. C’est important de consulter dans les plus brefs délais, car même en aigu il y a beaucoup de choses à mettre en place. Je sais que le temps d’avoir un rdv chez le médecin puis chez le kiné peut ressembler au parcours du combattant et c’est pour cela qu’il est à mon avis indispensable d’avoir constitué sa Dream Team (article prochainement). Vous pourrez ainsi récupérer au plus tôt de précieux conseils. Cela ne vous garantit pas un rdv rapide, mais au moins vous ne ferez pas d’erreurs de parcours.
- Dernier point sur la chaussure de Jean. Bien que récentes, celles-ci étaient déjà marquées sur le talon. En analysant ses chaussures de ville, on constatait également une usure importante à ce niveau. Cela traduit d’un frottement important de la partie postérieure de son talon sur la chaussure. Ce mouvement de friction à la course peut participer à l’irritation des différentes structures du talon, soit ici: le tendon d’Achille et les bourses Achilléennes. Attention donc au choix de votre chaussure…
Conclusion
Jean est un coureur amateur ayant déjà un antécédent de blessure chronique au tendon d’Achille droit. Cet épisode douloureux entretient une crainte lors des sorties en course à pied. Le travail de Jean ne favorise pas son retour veineux et peut ralentir l’adaptation de ses tissus.
Sur un excès de volume, d’intensité et un changement de chaussure récent, il fait de nouveau flamber son tendon d’Achille. Il est, à mon sens, indispensable en tant que sportif de prendre le temps d’approfondir ses connaissances dans la prise en charge des blessures. N’en déplaise aux kinés, mais le sportif se blesse régulièrement (un coureur sur deux chaque année). Les bonnes pratiques autour de la blessure devraient être connues de tous. Cela facilite grandement la récupération et minimise les délais avant le retour à l’entraînement.
Prenez le temps d’approfondir vos connaissances dans ce domaine, car je vous l’assure, le temps passé à enrichir votre culture sportive n’est rien comparé au temps que vous pourrez gagner en cas de blessure.
Remarque
Je ne prétends pas détenir la vérité absolue autour de ce cas. Il s’agit d’une analyse personnelle. Un autre professionnel de santé pourrait en avoir une différente. L’objectif au sein de ce type d’article est de vous partager des histoires vraies qui pourront se rapprocher de votre cas. En mettant en avant quelques problématiques liées à la planification des entraînements, au chaussage, à la prévention et la gestion des blessures, j’espère vous apporter de précieux conseils.
Découvrez le protocole complet de traitement de la tendinopathie d’Achille
Plus d’informations sur la pathologie dans l’article dédié ici
0 commentaires